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PASCAL ET LEIBNIZ : L'INFINI COMME PRINCIPE DE REFORME (un modeste mémoire de Maîtrise)

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TABLE DES MATIERES

PASCAL ET LEIBNIZ : L'INFINI COMME PRINCIPE DE REFORME

I. La référence pascalienne chez Leibniz : histoire et portée

A. Les premiers contacts (1667-1672) : de l'événement de la lecture des Pensées aux relations avec Carcavi et Huygens, amis de Pascal
B. Le voyage à Paris (1672-1676) : Leibniz pénètre dans le cercle de Pascal, qui l'inspire pour ses grandes découvertes mathématiques
C. Après le voyage à Paris (1676-1716) : un intérêt multiple et ambivalent pour la personne de Pascal


II. Des mathématiques à l'art de penser : proximité et radicales différences

A. L'œuvre mathématique : continuités et ruptures sur fond d'innovations conceptuelles concernant l'infini
B. Des mathématiques aux méthodes générales : deux esprits " géomètres et fins " attachés aux questions de méthode et à leur application au monde


III. Les pensées de l'infini et le problème de l'unité : de l'ordre géométrique à la métaphysique

A. Le tableau des infinités et le problème de leur unité
B. Le fragment sur la double infinité : d'une démultiplication de l'infinité dans la matière à la théorie de la substance
C. Conclusion : l'infini comme principe de réforme

 

 

 

INTRODUCTION

Si Pascal et Leibniz n'ont jamais eu la possibilité de se rencontrer ou de s'écrire , il paraît naturel de les mettre en relation : hommes à la fois scientifiques et philosophes, aux esprits pratiques et spéculatifs, profondément éclectiques, ils ont eu des amis ou correspondants communs ; sur le plan scientifique, plusieurs des grandes découvertes et inventions mathématiques et physiques du XVIIème siècle portent leur(s) signatures(s) et sont en véritable continuité théorique (machines à calculer, calcul infinitésimal, probabilités, combinatoire) ; sur le plan de la philosophie de la connaissance, chacun s'est préoccupé de la mise au point d'un " art de penser " ; enfin, ils se sont engagés dans la voie d'une apologétique, dont le but était de parvenir à convaincre les esprits les plus rationnels, voire des " esprits forts ".

Ainsi pourrait-on penser que la question ne porte pas sur " l'existence " d'une référence pascalienne chez Leibniz, mais d'emblée sur son rôle et sa portée : Leibniz fait référence explicitement à Pascal dans plusieurs textes, pour lui témoigner du respect et de l'admiration, mais aussi pour s'affirmer comme celui qui aurait dépassé certaines limites de ses travaux, de ses engagements, voire de son mode de vie. Lors de son séjour à Paris entre 1672 et 1676 (déterminant sur le plan intellectuel et pour sa découverte des mathématiques les plus avancées), Leibniz a l'occasion de fréquenter le cercle des amis de Pascal et d'accéder aux archives laissées à ses héritiers. Il ne fait donc aucun doute qu'il s'est trouvé dans un monde " imprégné " de la mémoire et des travaux du penseur français au début de sa carrière, entre 26 et 30 ans, et qu'il s'y est ménagé un accès hors du commun. De plus, une partie des textes de Pascal n'est parvenue jusqu'à nous que par le truchement des copies du philosophe allemand, tandis que certains textes importants de Pascal auxquels il a eu accès comme le Traité des Coniques semblent aujourd'hui perdus : à cet égard, son accès au " Pascal scientifique " a donc été meilleur que celui qui est possible aujourd'hui.

Cependant, être assuré de l'existence de cette référence de Leibniz à Pascal, et même de son caractère privilégié, ne nous assure pas de bien la comprendre. "L'influence " de Pascal sur Leibniz apparaît en effet au moins aussi progressive et complexe que " certaine ". Ainsi, le caractère " parcimonieux " de la référence faite à Pascal dans l'œuvre de Leibniz peut surprendre : ce dernier n'a pas consacré d'ouvrage à Pascal, comme il l'a fait pour Locke avec les Nouveaux Essais sur l'Entendement humain, ni polémiqué avec l'acharnement constant (explicite ou implicite) qu'il a mis contre l'auteur des Méditations Métaphysiques . On pourrait aussi contester que Pascal ait joué un rôle " d'initiateur " à proprement parler : Leibniz arrivait à Paris après une première période de maturation de sa pensée sous d'autres influences, nominalistes et luthériennes notamment, et avait déjà quelques idées sans Pascal d'une machine à calculer, des probabilités et même des infinitésimaux, qui occupaient l'esprit d'autres chercheurs contemporains, connus et admirés de Leibniz, comme Huygens. Enfin, pour renforcer l'intérêt d'un réexamen, on continue aujourd'hui à découvrir ou à publier de nouveaux textes de Pascal, et surtout de Leibniz, qui modifient significativement la perception des deux auteurs : Pascal n'apparaît plus aussi " exclusivement mystique " à la fin de sa vie qu'on a bien voulu le dire ; Leibniz n'est plus réductible à un " système " à l'architectonique parfaite. Il existe donc un paradoxe intéressant entre " l'évidence d'une connexion " entre ces deux penseurs et les caractères que nous venons d'énumérer.

L'étude des conditions d'accès par Leibniz à la pensée de Pascal sera donc la première étape nécessaire du travail (partie I). A partir des travaux des commentateurs et des références explicites à Pascal dans l'œuvre de Leibniz, il s'agira de décrire les relations entre ces auteurs, de les dater et de dégager les grands thèmes de confrontation, notamment sur le plan scientifique et mathématique. Ce travail a paru d'autant plus nécessaire qu'on a constaté quelques contradictions entre les commentateurs. On verra surtout que l'intérêt de Leibniz pour Pascal n'est pas réductible à des éléments de contexte historique , mais suit une démarche active : Leibniz accède à Pascal comme à une œuvre à continuer, de manière " instrumentale ", non révérencielle, au gré de ses propres besoins.

Après cette " base historique ", nous analyserons les positions de Pascal et Leibniz relativement aux mathématiques, à la physique et enfin aux méthodes (partie II). L'étude conceptuelle de la relation Pascal-Leibniz au travers de leurs travaux mathématiques ou physiques est très éclairante : ces travaux contiennent les bases des " méthodes ", un " art de penser ", une " doctrine " de l'infini voire une " doctrine " de la connaissance. Il s'agira donc de montrer en quoi Pascal et Leibniz ont forgé de nouveaux concepts importants pour la philosophie avec le calcul infinitésimal, et leur rapport avec les nouvelles méthodes de raisonnement. Il s'agira aussi de voir comment deux penseurs en étroite proximité, voire en continuité sur le plan mathématique et physique parviennent à des conceptions presque radicalement opposées sur des sujets qui débordent vers la métaphysique, l'anthropologie et la morale. Au-delà d'une comparaison entre auteurs, se pose la question du degré de cohérence et d'extension auquel peut prétendre une théorie scientifique, c'est à dire sa force en matière de certitude et d'extension.

Enfin (partie III), nous conclurons la réflexion en nous concentrant sur la notion d'infini. Pascal et Leibniz sont en effet allés de l'application d'une réflexion sur un art de penser, inspiré par leurs travaux mathématiques, à une réflexion globale (métaphysique, morale, anthropologique voire cosmologique selon les différents commentateurs) sur l'infini ; l'un et l'autre chercheront aussi une articulation entre la Foi, domaine de l'infini absolu que serait Dieu, et la Raison, considérant (chacun à leur manière) la visée apologétique comme la finalité ultime de l'ensemble de leurs réflexions voire de leurs vies. Mais même si Pascal et Leibniz se situent dans une continuité scientifique, ils en dériveront des conceptions métaphysiques et théologiques à la fois proches mais souvent en radicale opposition.

Au cours de tout ce cheminement, la réflexion sur les infinis apparaîtra donc au cœur : centrale pour Leibniz et Pascal, elle soulève en effet des problématiques importantes pour l'histoire de la philosophie et des idées, ainsi que pour les fondements de notre connaissance.

Il y a tout d'abord un " infini mathématique ", dont les enjeux sont essentiels. Avant les travaux de Pascal et Leibniz, l'infini est en effet source de " paradoxes " et de " mystères " pour un esprit humain conçu comme radicalement fini. Réputé résister à la connaissance , et attribut d'un " Dieu caché " (Deus Absconditus), il est objet de vénération ou d'admiration, quand il n'est pas plus concrètement source de " disputes ". En revanche, avec le calcul infinitésimal mis au point par Pascal et Leibniz est affirmée la possibilité (au moins partielle), contre Descartes notamment, pour un entendement fini, de connaître quelque chose de l'infini rationnellement, de poser des rapports entre " quantités inassignables ". De la même façon, les probabilités inventées par Pascal permettent de développer des savoirs rigoureux sur des phénomènes trop complexes à appréhender dans le détail ou imperméables à la mesure (comme les jeux de hasard ou aujourd'hui la physique quantique) : de l'infini est d'une certaine façon " enveloppé " dans les questions de probabilité. Il s'agit donc d'examiner comment le concept d'infini s'insère dans le champ mathématique, met un terme à certains paradoxes et implique une réforme dans ses méthodes et fondements. Déjà les conceptions de Pascal et Leibniz ne se confondent pas : Pascal introduit des concepts audacieux comme le " nombre infini ", témoignant de conceptions de la vérité, de la connaissance et de la finitude humaine singulièrement différentes de celles de Leibniz, qui refuse l'infini catégorématique, discret et actuel.

Mais cette réflexion déborde le cadre des mathématiques. La réforme des méthodes mathématiques affecte en effet la logique, la physique et la métaphysique, qui comprennent aussi des notions enveloppant " en quelque façon " la notion d'infini. De plus, mathématiques et méthodes ont parties liées : Pascal et Leibniz s'inscrivent dans un mouvement plus général, annonçant les Lumières, où l'on s'efforce de raisonner dans tous les domaines " à la manière des géomètres " en s'appuyant sur des démonstrations, des axiomes, des définitions et des principes logiques de raisonnement. Ainsi, de même qu'on a pu délivrer la raison de certains " labyrinthes, paradoxes ou mystères " mathématiques liés à l'infini peut-on espérer résorber en d'autres matières les impénétrables mystères, les éléments réputés " irrationnels ", voir des absolus (problème de la liberté humaine, de l'union de l'âme et de Dieu). Il s'agira donc d'examiner comment des " conclusions " qui mettent d'une certaine façon l'infini à la portée de la raison vont mettre en cause les champs physique (la nature et la matière), psychologique (l'âme), métaphysique (la substance et le monde) et enfin théologique (Dieu).

En quoi l'introduction de l'entité " infini " en mathématiques est-elle " principe de réforme " ? En quoi entraîne-t-elle une redéfinition de la question des limites à la connaissance et, en particulier du pouvoir de la raison ? Y a-t-il plusieurs ordres d'infinis dont certains continueraient à nous échapper ? Demeure-t-il de l'infini irrationnel en droit ?

 

BIBLIOGRAPHIE


Baruzi, Jean
Leibniz et l'organisation religieuse de la terre, d'après des documents inédits, par Jean Baruzi
Publication : Paris, F. Alcan, 1907.

Leibniz, par Jean Baruzi, avec de nombreux textes inédits
Publication : Paris : Bloud, 1909
Leibniz. Ed.

Belaval, Yvon
Leibniz, Initiation à sa philosophie
Vrin

Leibniz de l'âge classique aux Lumières
Editions Beauchesne, 1995

Bouchilloux, Hélène
Apologétique et raison dans les "Pensées" de Pascal
Paris : Klincksieck, 1995

Bouquiaux, Laurence
L'harmonie et le chaos : le rationalisme leibnizien et la "nouvelle science" / par Laurence Bouquiaux.
Louvain-la-Neuve : Éd. de l'Institut supérieur de philosophie ; Louvain ; Paris : Peeters, 1994 (impr. en Belgique).

Burbage, Frank
Leibniz et l'infini / par Frank Burbage et Nathalie Chouchan.
Paris : Presses universitaires de France, 1993

Catherine Chevalley
Pascal - Contingence et probabilités
Paris, PUF, 1995

P. Costabel, K. Hara, J. Itard, J. Mesnard
L'Oeuvre scientifique de Pascal
Presses universitaires de France, 1964

Couturat, Louis
La Logique de Leibniz
Editions Félix Alcan (1901), réédité en 1985 par Olms
Fichant, Michel
Science et métaphysique dans Descartes et Leibniz
Paris, Presses universitaires de France, 1998

Frémont, Christiane
L'être et la relation. Lettres de Leibniz à Des Bosses
Editions Vrin, 1999

Gardies, Jean-Louis
Pascal entre Eudoxe et Cantor
Vrin, 1984

Leibniz, Gottfried
L'estime des apparences : 21 manuscrits de Leibniz sur les probabilités, la théorie des jeux, l'espérance de vie
G. W. Leibniz ; texte établi, trad., introd. et annoté par Marc Parmentier.
Paris : Vrin, 1995

Lettre à Burnett
[Die] philosophischen Schriften von Gottfried Wilhelm Leibniz. Dritter Band / hrsg. von C. I. Gerhardt t. III
Collection Olms

Opuscules et fragments inédits / Gottfried Wilhelm Leibniz ; extr. des ms. de la Bibliothèque royale de Hanovre
éd. par Louis Couturat
New York : G. Olms, 1988.
Reprod. de l'éd. de Paris : F. Alcan, 1903

La Monadologie
Editions Delagrave, Emile Boutroux (1880)

Opuscules philosophiques choisis
Editions Vrin, 1978

La Naissance du calcul différentiel / G.W. Leibnitz ; introd., trad. et notes par Marc Parmentier.
Editions Vrin, 1989

Sämtliche Schriften und Briefe / Gottfried Wilhelm Leibniz ; hrsg. von der Akademie der Wissenschaften der DDR. Zweite Reihe, Philosophischer Briefwechsel. Erster Band, 1663-1685

Textes Inédits d'après les manuscrits de la Bibliothèque provinciale de Hanovre par Gaston Grua
Editions PUF, 1ère édition 1948

Mesnard, Jean
Pascal et les Roannez
Paris : Desclée, De Brouwer, 1965. - 2 vol. in-8

" Leibniz et les papiers de Pascal " p. 45 in
Leibniz à Paris : 1672-1676 / symposium de la G. W. Leibniz Gesellschaft, Hannover, et du Centre national de la recherche scientifique, Paris, à Chantilly, France, du 14 au 18 november [sic] 1976. (différents auteurs)

André Robinet
Architectonique disjonctive, automates systémiques et idéalité transcendantale dans l'œuvre de G. W. Leibniz
Paris : J. Vrin, 1986

Michel Serres
Le système de Leibniz et ses modèles mathématiques
Presses Universitaires de France, 1999

 

QUELQUES EXTRAITS DE TEXTES


1. Extraits de la Pensée 199 (Edition Lafuma) de Pascal

Pensée 199 : " Car enfin qu'est-ce que l'homme dans la nature ? Un néant à l'égard de l'infini, un tout à l'égard du néant, un milieu entre rien et tout, infiniment éloigné de comprendre les extrêmes ; la fin des choses et leurs principes sont pour lui invinciblement cachés dans un secret impénétrable. (…) Manque d'avoir contemplé ces infinis, les hommes se sont portés témérairement à la recherche de la nature comme s'ils avaient quelque proportion avec elle. C'est une chose étrange qu'ils aient voulu comprendre les principes des choses et de là arriver jusqu'à connaître tout, par une présomption aussi infinie que leur objet. (…) Quand on est instruit on comprend que la nature ayant gravé son image et celle de son auteur dans toutes choses elles tiennent presque toutes de sa double infinité. C'est ainsi que nous voyons que toutes les sciences sont infinies en l'étendue de leurs recherches, car qui doute que la géométrie par exemple a une infinité d'infinités de propositions à exposer (…) Mais nous faisons des derniers [principes] qui paraissent à la raison, comme on fait dans les choses matérielles où nous appelons un point indivisible, celui au-delà duquel nos sens n'aperçoivent plus rien, quoique divisible infiniment et par sa nature (…) nous voguons sur un milieu vaste, toujours incertains et flottants, poussés d'un bout vers l'autre ; quelque terme où nous pensions nous attacher et nous affermir, il branle, et nous quitte, et si nous le suivons il échappe à nos prises, nous glisse et fuit d'une fuite éternelle ; rien ne s'arrête pour nous. C'est l'état qui nous est naturel et toutefois le plus contraire à notre inclination. Nous brûlons du désir de trouver une assiette ferme, et une dernière base constante pour y édifier une tour qui s'élève à l'infini, mais tout notre fondement craque et la terre s'ouvre jusqu'aux abîmes. "

 


2. Transcription du post scriptum de la lettre à Burnett (Gerhardt tome III, p. 195)


" J'espère que mes découvertes de Mathématiques, dont le public est déjà instruit maintenant, et qui ont été même applaudies des plus excellents hommes de votre île (où pourtant les sciences Mathématiques sont dans leur trône) contribueront quelque chose à donner du crédit à mes méditations Philosophico-Théologiques. Et à propos de cela, je vous raconterai une petite histoire de feu Monsieur Pascal, que j'avais apprise de feu Monsieur le Duc de Roannez, qui avait été son ami particulier. Vous savez que Monsieur Pascal (qui est mort trop tôt) s'était à la fin adonné à établir les vérités de la Religion ; et comme il passait avec raison pour un excellent géomètre, ses amis bien intentionnés pour la religion étaient bien aises de son dessein, parce qu'ils jugeaient que cela serait avantageux à la religion même, quand on verrait par son exemple que des esprits forts et solides peuvent être bons Chrétiens en même temps. Il arriva que M. Pascal trouva quelques vérités profondes et extraordinaires en ce temps-là sur la cycloïde ; et comme ses amis croyaient que d'autres auraient du mal à y parvenir, parce qu'en effet ces méthodes étaient nouvelles alors, ils le poussèrent à les proposer en forme de problèmes à tous les géomètres du temps
Parce qu'ils croyaient que cela servirait encore davantage à relever sa réputation, si d'autres ni pouvaient point arriver. Mais M. Wallis en Angleterre, le P. Laloubere en France, et encore d'autres trouvèrent moyen de résoudre ces problèmes, et cela fit même quelque tort à M. Pascal, parce qu'on ne savait pas ses raisons. Pour moi qui n'ai pas la vanité de faire comparaison avec cet homme célèbre, et qui n'ai point cette opinion de moi, que je puisse faire des choses où d'autres ne puissent arriver, je n'ai pas laissé d'avoir le bonheur de faire quelques découvertes, qui ont cela de bon qu'elles ouvrent le chemin pour aller plus loin, et qu'elles augmentent le nombre des méthodes qui font partie de l'art d'inventer. J'ai encore eu le bonheur de produire une machine arithmétique infiniment différente de celle de M. Pascal, puisque la mienne fait les grandes multiplications et divisions en un moment, et sans additions ou soustractions auxilliaires, au lieu que celle de M. Pascal (dont on parlait comme d'une chose merveilleuse et non sans raison) n'était propre que pour les additions et soustractions (…) ; c'est pourquoi Messieurs Arnauld, Huygens et même Messieurs Perrier, neveux de M. Pascal, quand ils eurent vu mon échantillon à Pars, avouèrent qu'il n'y avait point de comparaison entre celle de M. Pascal et la mienne. (…) Ainsi, si les belles productions de M. Pascal dans les sciences les plus profondes doivent donner du poids aux pensées qu'il promettait sur la vérité du Christianisme, j'oserais dire que ce que j'ai eu le bonheur de découvrir dans les mêmes sciences ne ferait point de tort à des méditations que j'ai encore sur la religion ; d'autant que mes méditations sont le fruit d'une application bien plus grande et bien plus longue que celle que M. Pascal avait donnée à ces matières relevées de Théologie, outre qu'il avait l'esprit plein des préjugés du parti de Rome, comme ses pensées posthumes le font connaître, et qu'il n'avait pas étudié l'histoire ni la jurisprudence avec autant de soin que j'ai fait. Et cependant l'une et l'autre est requise pour établir certaines vérités de la Religion Chrétienne, comme j'ai déjà dit dans ma lettre. Il est vrai que son génie extraordinaire suppléait à tout, mais souvent l'application et l'information est aussi nécessaire que le génie. Enfin, si Dieu me donne encore quelque temps de santé et de la vie j'espère qu'il me donnera aussi assez de loisir et de liberté d'esprit pour m'acquitter de mes vœux, faits il y a plus de 30 ans, pour contribuer à la piété et à l'instruction publique sur la matière la plus importante de toutes. "


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